Pilotage du cash et du bilan
Traditionnellement orienté sur l’analyse du résultat, le contrôleur de gestion a vu le pilotage du cash et le suivi du BFR prendre une place de plus en plus importante avec les crises de liquidités récentes et les incertitudes des marchés financiers.
Dans de nombreuses entreprises, les crises ont rendu ce pilotage quotidien tant les marges de manœuvre se sont resserrées et que le règlement des salaires et des fournisseurs est devenu une priorité pour éviter la cessation de paiement.Le contrôleur de gestion est de plus en plus souvent investi du pilotage de projets de réductions de coûts ou d’optimisation du BFR, notamment dans les entreprises avec des stocks importants, où les coûts de portage des stocks et leur obsolescence obèrent la rentabilité de l’exploitation.
LE CASH RATIO MAJEUR DE LA PERFORMANCE
- EBE versus REX
L’excédent brut d’exploitation (EBE) tend à remplacer le résultat d’exploitation (REX) dans l’évaluation de la performance des entités car il est dépollué des provisions qui peuvent être influencées par des arbitrages de pilotage et reflète mieux le cash généré par l’entreprise et donc sa capacité à agir.
l'EBE Il s’apparente à l’EBITDA anglo-saxon. Les entreprises sont souvent valorisées en multiples d’EBITDA, le multiple variant en fonction du secteur d’activité.
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Pilotage du cash flow et du bilan |
- La création de valeur ou la génération de cash
Les entreprises optent de plus en plus souvent pour l’indicateur de création de valeur comme objectif de performance des managers.La création de valeur mesure ce qui reste lorsque l’on a payé les capitaux engagés , également appelés capitaux employés.Cette notion se substitue de plus en plus à la notion traditionnelle de rentabilité des capitaux engagés = résultat net/capitaux engagés (en anglais ROE : Return On Equity).Il y a création de valeur, également appelée EVA (Economic Value Added) , si le différentiel entre le cash généré et le coût des capitaux engagés est positif.
Génération de cash = REX + Amortissements + Provisions – Impôt sur les sociétés – Coût des capitaux employés
- La notion de free cash- flow ou flux de trésorerie disponible
Le contrôleur de gestion est amené à promouvoir une culture du cash auprès des opérationnels. La notion de free cash- flow est importante car elle justifie les efforts d’optimisation du BFR et de priorisation des investissements. Il s’agit du cash disponible une fois payés tous les créanciers de l’entreprise. Cet argent permet à l’entreprise de rémunérer ses actionnaires, de réduire sa dette ou de faire les acquisitions nécessaires à la mise en œuvre de sa stratégie.
LES PRÉVISIONS DE TRÉSORERIE
Les crises de liquidité amènent les entreprises à améliorer leur capacité d’autofinancement pour avoir moins recours aux banques. Dans ce cadre deux axes majeurs se dégagent, outre l’amélioration de la performance opérationnelle :
- l’optimisation du BFR.
- la réduction des investissements.
Dans ce contexte, les prévisions de cash deviennent le nouveau must du contrôle de gestion, en particulier le suivi des projets et le timing des investissements pour prévoir les gros décaissements.
Afin de mieux optimiser leur trésorerie, les entreprises doivent emprunter au plus juste et une bonne vision des liquidités permet d’anticiper les allers- retours sur les placements, et d’éviter des emprunts inutiles. Dans ce contexte, les prévisions de trésorerie doivent souvent être anticipées à trois mois. Le contrôleur de gestion, s’appuyant sur sa connaissance du budget mensualisé, sur les investissements attendus et sur le suivi du BFR, peut estimer au mieux les liquidités futures.
Les prévisions de trésorerie doivent être effectuées sur le court et le long terme :
- sur le court terme, pour pouvoir réagir vite en cas de dérive tels des retards clients, des stocks qui augmentent trop vite lors de la baisse des carnets de commande…
- sur le long terme, cela permet de voir les possibilités d’arbitrage entre les choix tels que se désendetter dans les situations d’incertitudes économiques ou d’investir
- Les enjeux du besoin en fonds de roulement
Le BFR représente l’argent immobilisé par l’entreprise pour exercer son exploitation.
Le BFR opérationnel se calcule en additionnant les créances clients et les stocks, et en retranchant les créances fournisseurs. Il varie en fonction de l’organisation de l’activité de l’entreprise, mais aussi du niveau de l’activité.
Le ratio usuel est le ratio de rotation BFR/CA * 365 exprimé en nombre de jours de CA HT lorsqu’il est calculé sur l’année
- Le poste client
La gestion du poste client est particulièrement importante dans le cas d’une société en croissance, car le nouveau CA risque d’être immobilisé pour une grande partie dans les créances clients alors que l’entreprise peut avoir investi fortement pour faire face aux nouvelles demandes de production. Le problème de la solvabilité des clients est également crucial dans une petite entreprise où un seul client insolvable peut amener au dépôt de bilan.
Le contrôleur de gestion fera un point régulier avec l’administration des ventes (parfois appelée credit manager) sur la solvabilité des clients : un accroissement des délais de règlement est souvent le signe de difficultés de trésorerie avant un éventuel dépôt de bilan. Ce peut être l’occasion de vérifier que les cautions sont toujours bien à jour, si ce n’est pas trop tard.
- Les stocks
Les entreprises se penchent de plus en plus sur ce poste qui peut s’avérer très important dans certaines industries. Un projet d’optimisation peut s’avérer très payant, en peu de temps, en regardant ce que les stocks représentent en mois de consommation, et en retravaillant les délais d’approvisionnement avec les fournisseurs.
Le contrôleur de gestion doit sensibiliser les opérationnels à ce coût de détention (Frais financiers + Coût de stockage + Obsolescence) pour qu’ils soient plus vigilants à gérer au plus près du besoin. Le bon niveau de stock provient souvent d’une bonne qualité des prévisions.
Le ratio suivant est le DIO (Days Inventories Outstanding) :Valeurs des stocks/Achats HT * 365
- Le poste fournisseur
Les entreprises ont tendance à allonger les délais de règlement lorsque leurs liquidités sont insuffisantes au mépris des contrats. Mais cette pratique peut se retourner contre elles, les fournisseurs intégrant les retards potentiels dans les prix et exigeant des paiements comptants ou des cautions lorsque les dérives deviennent trop importantes. On suit en général ce poste en nombre de jours d’achat sur l’année
DPO (Days Payable Outstanding) :Encours fournisseurs/Coût de produits vendus TTC * 365
Ce délai varie beaucoup suivant les habitudes du pays ou du circuit de distribution.
LA STRUCTURE DU BILAN
La structure du bilan d’une entreprise dépend bien sûr de son activité, mais aussi de sa stratégie et de son niveau de maturité.
Une entreprise récente ne pourra souvent compter que sur ses fonds propres, les banques étant réticentes à prêter dans les premières années d’existence d’une société.
Une entreprise peut se lancer dans le pari des acquisitions en tablant sur des cash- flows futurs qui, s’ils ne se réalisent pas, la mettent en danger.
Elle sera parfois susceptible d’être elle- même la proie d’un nouvel acquéreur ou pire être conduite à la faillite.
A contrario, une entreprise qui dispose de cash- flows importants et d’un faible endettement peut décider de rachats stratégiques pour son développement et de façon plus optimale notamment quand ses cibles sont affaiblies.
Le contrôleur de gestion utilise le coût des capitaux propres comme le rendement minimal attendu des investissements de l’entreprise.
Les capitaux propres
Le critère de performance des capitaux engagés est souvent le ROCE :
Rentabilité des capitaux engagés (Return On Capital Employed) = Résultat net/Capitaux engagés.
Ce ratio permet de comparer des entreprises d’un même secteur pour mieux apprécier leur performance. En effet les actionnaires attendent une certaine rentabilité de leur investissement, qu’ils trouvent à travers les dividendes qui leur sont versés et/ou les plus- values qu’ils peuvent encaisser en revendant leurs actions.
Avec des fonds propres importants une entreprise est plus forte, mais le coût des capitaux propres (dividendes non déductibles) peut être un frein à son développement.Par ailleurs de nouveaux apports en capital se traduisent par une dilution des droits des anciens actionnaires qui perdent une partie de leur pouvoir de décision.
L’arbitrage se fait alors entre un nouvel endettement (moins coûteux en règle générale que la rémunération des capitaux propres) et une augmentation de capital.
- La dette
Elle représente l’alternative au financement via les fonds propres :
- dans les années d’expansion économique, les entreprises utilisaient souvent l’effet levier (ou gearing) pour se développer en tablant sur un moindre coût de la dette que des fonds propres. La dépendance vis- à- vis des banques, plus réticentes à prêter dans un contexte de raréfaction des liquidités (credit crunch) , a sensiblement réduit les pratiques d’endettement à outrance. Le ratio Dette/EBITDA ou EBE donne l’indication du nombre d’années qu’il faudrait à l’entreprise pour rembourser sa dette.
- plus la dette est importante, plus l’effet levier (gearing) est fort mais la vulnérabilité de l’entreprise s’accroît en particulier lorsque les taux remontent, entraînant souvent un alourdissement du poids de la dette. Les frais financiers et les échéances de remboursement du capital de la dette peuvent s’avérer très lourds rendant l’entreprise plus vulnérable.A contrario, avec des fonds propres importants une entreprise est plus forte, mais le coût des dividendes, non déductibles, peut être un frein à son développement.
Fin
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